Dans cet extrait du film de 2013 signé Scorcese, le jeune Jordan Belfort (courtier junior interprété par DiCaprio) reçoit une leçon magistrale de son mentor Mark Hanna (courtier senior interprété par McConaughey). Ce dernier a une manière plutôt directe de lui exposer le business model d’une société financière de courtage :
« Number 1 rule in Wall street, nobody knows of the stock is gonna go up, down, sideways or in f*cking circles »
Personne ne sait si une action va monter ou descendre
« We dont create shit, we dont build anything »
en gros, on apporte aucune valeur
« But you and me, the brokers, we’re taking on cold hard cash, the commission mother f*cker »
Nous les courtiers, on encaisse les commissions
La messe est dite ! Le secret en Bourse ne serait donc pas d’espérer une plus-value en multipliant les ordres d’achat/vente. Cette vision est typique du particulier qui espère une formule magique. Non, le secret se trouve plutôt du côté des professionnels, et consiste tout simplement à placer un maximum de frais sur les flux de transactions, les enveloppes, le conseil ou les fonds eux-même.
Prenons l’exemple d’une assurance vie pilotée vendu à un particulier :
Le fléchage fiscal du gouvernement en fait un argument commercial fort : les plus values ne sont pas imposées tant que les fonds restent chez l’assureur. Le contribuable est donc tenté par cette enveloppe qui bénéficie à plusieurs métiers de la finance, et non pas uniquement à sa banque.
La banque : elle joue le rôle de commercial et vend un produit d’épargne financière « assurance vie » de son assureur partenaire. Elle touche sa commission lors de la souscription (ou droits d’entrée si vous êtes encore en banque traditionnelle) et sur les rétrocommissions des fonds détenus (nous le verrons plus tard). A noter que la Banque peut aussi se substituer à un courtier en ligne.
L’assureur : il gère l’enveloppe « assurance vie » et la vie du contrat. Il facture donc des « frais de gestion », de l’ordre de 0.7% pour un fonds euro, et plus pour une Unité de Compte (UC). Ces frais, en cherchant un peu, sont relativement transparents. L’assureur propose donc au sein de son contrat un certain nombre de fonds partenaire de gestionnaires, souvent filiale du groupe bancaire ou de l’assureur.
Le gestionnaire de fonds : se presse pour être au catalogue des assureurs. Il perçoit des « frais de gestion » qui peuvent être ou non dépendant de la performance du fonds. Ces frais sont mentionnés dans le Document d’Information Clé pour l’Investisseur (le DICI). De plus, à ces frais de gestion peuvent s’ajouter des frais de surperformance si le gestionnaire fait mieux que son indice de référence (assez rare). Les frais de gestion sont particulièrement élevés pour les fonds gérés activement : de 1% à plus de 3% pour les plus gourmands. Les gestionnaires de fonds peuvent rémunérer la Banque ou l’Assureur qu’il considère comme des Apporteurs d’Affaire en le rétrocédant une partie des frais de gestion perçu. Souvent, la banque ou l’assureur vous indique oralement qu’il n’y a pas de frais de gestion : c’est faux, ces frais existent mais sont prélevés directement sur la performance du fonds, ils n’apparaissent donc pas sur les relevés de compte de l’épargnant ! Certains sites comme Quantalys sont spécialisés dans la comparaison de ces fonds qui portent des noms divers et variés mais qui au final, suivent tous les même indices (CAC 40 pour les « valeurs françaises », SBF 120 pour les mid cap, Stoxx 50 ou 600 pour l’Europe, DAX, FTSE, MSCI de tous poils etc).
La gestion pilotée : « autrefois réservée aux seuls fortunés », ce type de conseil se généralise via les banques en ligne. Pourquoi ? Parce qu’il permet tout simplement d’ajouter une couche supérieure de frais, de l’ordre de 0.3% à 1.5%. La gestion pilotée réalise en automatique les arbitrages en fonction des fonds partenaires du moment, et selon un profil de risque donné (le plus souvent sur la base d’un ratio Action/Obligation).
L’assurance vie est LE produit financier du moment, et fait l’objet d’une publicité conséquente dans la presse dite patrimoniale. Exemple des annonceurs 2019 du magazine Le Particulier focalisé sur ce support :
- janvier (x7) : MIF, Binck, CARAC, la France Mutualiste, assurancevie.com, placement-direct.fr, altaprofits.com
- février (x2) : ASAC FAPES, Aviva
- mars (x14!) : boursedirect.fr, Garance, Gaipare, Binck, ASAC FAPES, altaprofits.com, SMAvie.fr, CARAC, Boursorama, MIF, assurancevie.com, placement-direct.fr, Linxea, MACSF
- avril (x7) : MIF, placement-direct.fr, ASAC FAPES, Nalo, Linxea, assurancevie.com, MACSF
- mai (x7) : MIF, assurancevie.com, ASAC FAPES, altaprofits.com, Binck, Nalo, placement-direct.fr
- juin (x7) : MACIF, placement-direct.fr, MIF, SMAvie.fr, ASAC FAPES, CARAC, MACSF
Au final, tous ces intermédiaires entre le particulier investisseur et les marchés financiers se foutent pas mal de la performance de votre portefeuille, qu’il monte, descende ou fasse des loopings : leurs commissions sont basées exclusivement sur le montant de vos avoirs ! Un autre exemple serait celui les courtiers qui vantent les gains potentiels du Forex ou des crypto-monnaies. Là encore c’est le professionnel qui s’enrichit en mettant gracieusement à disposition uen platerforme de day trading pour son Client, et en prenant sa commission pour chaque transaction !