« Je suis passé par un courtier, j’ai eu un meilleur taux que chez ma banque ! ». Que se cache-t-il derrière cette phrase que vous avez peut-être déjà entendu ?
Le taux brut est la première source de coût d’un prêt immobilier amortissable. Ce taux brut est le plus souvent mis en avant par la courtier, au détriment des autres sources de coût, mais il ne doit pas être confondu avec le taux effectif global du prêt ou TEG qui prend en compte le coût total du prêt et pas uniquement les intérêts bancaires.
Comment fonctionne le taux brut ?
Au départ il y a la somme empruntée, que l’on appelle capital. Et sur ce capital s’applique un taux d’emprunt que l’on appelle le taux brut. Il est important de comprendre que le taux brut est le taux annuel qui s’applique au capital restant à rembourser. Ainsi, au début du prêt, ce taux s’applique sur la totalité du capital, et plus le prêt avance dans le temps, plus il est « mature », et plus le montant des intérêts diminuent. Les intérêts sont donc plus important en début de prêt qu’en fin de prêt. Rentrons tout de suite dans le chiffres pour mieux comprendre…
Exemple d’un prêt de 200.000€ sur 20 ans
Avec un taux brut de 2.0%, l’emprunteur paiera donc 200.000€ x 0.02 = 4000€ d’intérêts la première année et 240€ la dernière année. Le montant total des intérêts sera de 44.600€, soit 22.3% du capital emprunté.
Avec un taux brut de 1.5%, l’emprunteur paiera 200.000€ x 0.015 = 3000€ d’intérêts la première année et 172€ la dernière année. Le montant total des intérêts sera de 33.000€, soit 16.5% du capital emprunté.
Avec un taux brut de 1.0%, l’emprunteur paiera donc 200.000€ x 0.01 = 2000€ d’intérêts la première année et 110€ la dernière année. Le montant total des intérêts sera de 21.700€, soit 10.8% du capital emprunté.
« les banques ne gagnent pas d’argent avec les crédits » nous dit le courtier, est-ce vrai ?
Vous l’avez peut-être entendu de la bouche d’un courtier mais qu’en est-il vraiment ? Pour répondre à cette question il faut comprendre le mode de financement d’une banque. En effet, lorsque celle-ci prête à un particulier sur 20 ans, elle n’emprunte pas à une autre banque sur 20 ans mais sur une durée beaucoup plus courte. On dit que le banque finance ses crédits long terme par des dettes à court terme, ce qui lui permet, entre autres, d’obtenir des taux beaucoup plus bas que ceux affichés aux particuliers. C’est le même principe pour des emprunts d’état, la France peut emprunter sur 10 ans, mais elle financera ses traites grâce à des taux courts renégociés chaque année, cela s’appelle « roller » sa dette. Mais revenons aux banques, en ce début 2018 par exemple, le taux interbancaire de la zone euro, aussi appelé taux Euribor, est bas, très bas, tellement bas qu’il est même négatif : -0.2% sur 12 mois. Un taux négatif, qu’est-ce que ça veut dire ? Ça veut dire qu’un emprunteur rembourse moins que le capital : une opération magique malheureusement réservée aux banques ! La banque emprunteuse de 200.000€ dans notre exemple ne devra rembourser à son créancier que 199.600€ 12 mois plus tard. Or, un particulier qui emprunte 200.000€ à 1.5% devra lui rembourser 233.000 € à terme. Le gain de l’opération pour la banque est donc ici de +33.400 €.
Conclusion
Dans l’exemple de financement ci-dessus, le taux brut a une influence direct sur le montant des intérêts : une différence de taux brut de 0.1% fait donc varier le montant des intérêts de 2300€, ce qui est loin d’être négligeable. Il est donc fondamental d’obtenir un taux brut aussi faible que possible mais… nous allons voir que c’est loin d’être l’unique source du coût total d’un prêt.
Contexte
Deuxième source de coût d’un prêt immobilier : l’assurance emprunteur. Rendue obligatoire par la banque qui ne veut pas prendre de risque s’il vous arrive un accident, celle-ci vous oblige à souscrire à une assurance couvrant le décès, l’invalidité, l’incapacité temporaire ou partielle, voire la perte d’emploi. Cette assurance n’est pas forcément utile dans la mesure ou le particulier dispose parfois déjà, dans le cadre de son travail, d’une complémentaire qui prend déjà en charge le remboursement d’un crédit en cas d’accident. Un argument auquel la banque n’est pas sensible et pour cause. Le plus souvent, l’assurance n’est pas une option bancaire « maison » mais un produit que la banque achète à un assureur, et qui vous la revend. La législation s’est tout de même considérablement assouplie ces dernières années en offrant au particulier la possibilité de soit changer d’assurance en court de prêt, avec certaines réserves, soit de prendre initialement une assurance extérieur, c’est ce qui s’appelle une délégation.
Quotité d’Assurance késako ?
Si vous emprunter seul, vous devez vous assurer à 100%, c’est à dire qu’en cas de décès (DC), invalidité (PTIA, IPT, IPP) ou incapacité (ITT), votre assurance prend en charge la totalité des traites restantes. En revanche, si vous empruntez en couple, vous devez a minima vous assurez à 100%, mais cette « quotité » d’assurance peut monter jusqu’à 200%, explications.
Supposons par exemple que Madame et Monsieur soient assurés à 50%-50%. Si Monsieur ou Madame décède, le survivant devra rembourser 50% de traites restantes.
Supposons maintenant que Madame et Monsieur soient assurés à 100%-50%. Si Monsieur décède, les traites restantes seront prises en charge à 100% par l’assurance, tandis que si Madame décède, la moitié du prêt restera à charge de Monsieur. Ce système est hérité d’un schéma familial dans lequel un des conjoints gagne moins que l’autre, et lui permet d’éviter une grosse charge financière en cas d’accident de la vie.
La quotité d’assurance max pour un couple d’emprunteur est donc de 100%-100%, c’est à dire que le prêt est totalement pris en charge par l’assurance en cas d’accident de l’un ou l’autre des emprunteurs.
Options
Quelque soit l’option retenue, cette assurance aura un coût. Une assurance extérieure sera a priori moins chère qu’une assurance inclue dans un package. Vos capacités de négociations seront alors a priori fonction de votre dossier : si vous n’avez pas d’apport ou de faibles revenus, la banque peut décider de ne plus vous prêter si vous externaliser l’assurance. Garder tout de même à l’esprit que la banque est avant tout un commerçant, elle vous prête de l’argent en échange d’un bénéfice. Rester en bon terme avec sa banque peut vous permettre de contracter dans nouveaux prêts dans le futur, dans le cas d’investissements locatifs par exemple.
Réserves
La législation permet de changer d’assurance, seulement si les conditions de la nouvelle assurance sont au moins équivalentes à celle de l’assurance existante. Prenons un exemple, vous êtes un couple et vos coefficients sont actuellement de 100%-100% : vous ne pouvez pas changer d’assurance pour une version moins chère pour un coefficient de 50%-50%.
A ce propos vous devez montrer une certaine méfiance à l’égard de la retranscription des propositions par le courtier. En effet, certaines banques comme le Crédit Agricole obligent actuellement les emprunteurs à s’assurer à 100%-100%. Si vous n’avez pas connaissance des coefficients, le courtier peut, à tord, vous proposer de faire appel à la loi Lagarde pour une délégation vers des conditions moindres.
Calcul du Coût de l’Assurance #1 : Mensualité Fixe
La manière historique et la plus simple d’exprimer et de facturer une assurance est la mensualité fixe. Pour reprendre l’exemple d’un prêt sur 20 ans, si la mensualité correspondant à l’assurance est de 30€, le coût total de l’assurance est donc de 30€ x 12 mois x 20 ans = 7200€.
Calcul du Coût de l’Assurance #2 : TAEA (Taux Annuel Effectif de l’Assurance)
Calculer et facturer une assurance à partir d’un taux qui s’applique sur la capital restant présente un avantage pour la banque en cas de remboursement anticipé : les paiements sont concentrés sur le début du prêt. C’est la même gymnastique que pour le taux brut qui s’applique aux intérêts liés au remboursement du capital : plus le prêt est « mature », plus les intérêts sont faibles. Dans le cas de l’assurance c’est la même chose, mais voyons quelques chiffres pour mieux comprendre…
Dans ce graphique nous prenons l’exemple d’un prêt de 200.000 € de capital remboursé sur 20 ans. Le coût de l’assurance est identique, 7200€, mais facturé différemment : soit 240 mensualités de 30€, soit un taux de 0.34%. On voit clairement que si le remboursement du crédit est anticipé au bout de 10 ans, la formule TAEA aura coûté plus cher.
Conclusion
Pour comparer ce qui est comparable, demander à avoir le coût total de l’assurance quelques soit la formule choisie. Si l’expression du TAEA ne vous parait pas clair, demander un échéancier.
Jusqu’à présent nous avons vu que la banque vous prête à une taux donné, et qu’elle se protège du risque des accidents de la vie par la souscription d’une assurance. Pour autant, le risque du prêteur n’est pas éliminé pour autant : il se peut que l’emprunteur ne puisse plus remboursement son prêt, c’est ce qu’on appelle le défaut de paiement, et c’est contre ce risque que la banque veut se prémunir via la Garantie. A noter que cette garantie n’est pas obligatoire, mais qu’elle peut être exigée.
Pour faire simple, il existe trois types de garanties :
A. Le Nantissement
L’emprunteur dépose une somme d’argent sur un compte de la banque mais il ne peut plus le toucher pendant toute le durée du prêt. Si l’emprunteur ne rembourse plus le crédit, la banque saisit l’argent déposé sur le compte. Pour un prêt classique amortissable, cette solution reste assez rare, elle s’appliquer en revanche sur un autre type de prêt qui n’est pas traité ici : le prêt in fine.
B. La Sûreté Réelle
Cette garantie de type « publique » est souscrite auprès du notaire, c’est ce qu’on appelle l’Hypothèque Conventionnelle (HC), ou sa variante low cost, la Privilège de Prêteur de Denier (PPD). Cette fois, en cas de défaut de paiement, la banque est prioritaire pour saisir l’achat que vous avez réalisé grâce au prêt, donc votre appartement, maison ou immeuble. Cette garantie est facturée en 2 temps : au moment de la signature de l’acte chez le notaire, puis ensuite lors de la vente du bien ou de la fin du prêt. C’est ce qui s’appelle la mainlevée d’hypothèque.
C. Le Cautionnement
Cette garantie de type « privée » consiste à s’assurer d’un défaut de paiement auprès d’un tiers, par exemple Crédit Logement. Cet organisme mutualise les risques d’impayés et vous facture également en 2 temps : au début du prêt lors de sa souscription,vous versez la totalité de la caution puis, en cas de remboursement anticipé, de vente du bien ou au terme du prêt l’organisme vous reverse une part de cette caution.
Sûreté ou Cautionnement ? Calcul Basique
Prenons l’exemple d’une HC/PPD (vous savez désormais ce que cela signifie) facturée 1000€ lors de la vente, puis 1000€ lors de la mainlevée hypothécaire (difficile de savoir précisément le coût dans X années). D’un autre côté le cautionnement coûte 4000€, mais l’organisme caution vous reverse 2000€ à terme. La solution « notaire’ vous coûte 1000+1000 = 2000, la solution « caution » vous coûte 4000-2000 = 2000. Ces 2 solutions sont donc a priori équivalentes.
Sûreté ou Cautionnement ? Calcul par un Investisseur
Comme le dit l’adage « le temps c’est de l’argent », et ce diction s’applique pleinement au monde de la Finance. Lorsque vous placer votre argent sur un Livret A, il vous rapporte actuellement 0.75%. Lorsqu’une banque « place » son argent dans votre appartement, vous lui rapportez 1.0, 1.5, 2.0%. Dans l’exemple du Livret A, les intérêts sont capitalisés, explications.
Capitalisation
Si vous placer 1000€ sur votre Livret rémunéré 0.75% pendant 1 an, vous aurez généré 7.50€ d’intérêt. L’année suivante vous disposez d’un capital de non plus 1000€, mais de 1007.50€. Au terme de la 2e année les intérêts générés seront donc de 7.56€, et ainsi de suite. On dit que les intérêts sont « capitalisés », c’est à dire qu’ils génèrent eux-même des intérêts : « l’argent appelle l’argent ». La formule mathématique du capital obtenu sur votre Livret A après N année est ici 1000 x 1.0075^N, le signe « ^ » signifiant « puissance ».
Actualisation
L’actualisation est l’inverse de la capitalisation. Pour reprendre l’exemple ci-dessous, quelle somme faudrait placer sur ce Livret A pour obtenir 2000€ dans 20 ans ? La réponse est 2000 x (1/1.0075^20) = 1722.37€
Mais revenons à la garantie du prêt immobilier : votre taux d’emprunt correspond grosso modo au taux versé par une Assurance Vie en Euro. Pour l’année 2017, les chiffres ne sont pas encore connu au moment de la rédaction de cet article mais un taux de 1.5% semble la moyenne. Reprenons dans la comparaison garantie « notaire » contre garantie « caution » dans le cas d’un prêt sur 20 ans…
- Pour l’hypothèque : 1000€ aujourd’hui plus 1000€ dans 20 ans, cela fait 1000 + 1000 x (1/1.015^20) = 1743€ et non plus 2000€.
- Pour la caution : 4000 aujourd’hui moins 2000€ dans 20 ans, cela fait 4000 – 2000 x (1/1.015^20) = 2515€ et non plus 2000€.
Conclusion
A moins d’avoir un compte bancaire bien remplit, la banque exigera une garantie. Attention, si le mode de calcul peut faire paraître le cautionnement moins cher, l’hypothèque/PPD présente l’avantage de mobiliser un apport inférieur lors de la signature de la vente.
Des frais de dossier peuvent vous être facturés par la banque, que vous passiez ou non par un courtier. Ils correspondent en théorie à la rémunération du salarié qui a monté votre dossier. Le montant de ces frais de dossier peut varier de 0% à 1% du capital emprunté. Ils sont négociables et dépendent de plusieurs facteurs : la qualité de votre dossier, vos encours, votre épargne, la politique de l’établissement bancaire, la période de l’année, le conseiller, bref, l’important c’est de connaître leur montant le plus tôt possible.
Formes de rémunération
Le courtier se rémunère de plusieurs manières : soit il vous facture des honoraires pour le service rendu, soit il reçoit une rétro-commission de la part de ses banques partenaires, soit les deux à la fois.
- Les honoraires doivent être clairement mentionnés dans le « mandat de recherche de financement ». Vous devez absolument pouvoir les quantifier avant de signer ce mandat. Ils sont généralement plafonnés à 1.2% du capital emprunté, et peuvent éventuellement être intégrés dans le financement. Ces honoraires ne peuvent être facturés QUE si vous contractez effectivement un prêt par l’intermédiaire du courtier.
- Les rétro-commissions sont beaucoup plus obscures et font l’objet d’un accord entre la banque et la courtier. Fiscalement, la banque considère le courtier comme un « apporteur d’affaires » et est ainsi libre de le rémunérer à sa guise. Il va de soi que toutes les sommes perçues par le courtier diminuent d’autant vos capacités de négociation !
Quelque soit la nature des frais de courtage, cette relation commerciale entre banque et courtier implique une certaine loyauté au fil du temps : comme le courtier est un « apporteur d’affaires » pour la banque, il vous sera impossible de traiter directement avec une banque préalablement contactée par l’entremise d’un courtier. Pensez donc à mentionner noir sur blanc les banques que vous souhaitez exclure du mandat de recherche.
Contexte
La « relation bancaire » représente l’ensemble des frais que vous allez payer à la banque durant la durée du prêt. Ces frais ne font pas partie officiellement du coût du prêt immobilier mais vous allez les subir pendant de nombreuses années. Attention également à l’évolution de ces frais dans le temps. Cela fait déjà plus de 10 ans que les banques en ligne existent en France, et la concurrence à venir vient de la banque sur mobile. Le graphe ci-dessous montre par exemple comment les frais de tenue de compte ont triplé en 5 ans à La Banque Postale.
Comparer ce qui est comparable
Il y a quelques années, le banques brouillaient les pistes avec la création de « pack » incluant ou pas frais de tenue de compte, chéquier, cartes bancaires, assurances des moyens de paiement, accès banque en ligne, frais de retrait dans les DAB tierces etc… C’est désormais révolu suite au décret du 5 novembre 2015. En effet, le gouvernement, via la comité consultatif du secteur financier (CCSF), a mis en place son propre comparateur des tarifs bancaires.
Coût de la banque de détail
Dans l’exemple ci-dessus, pour des prestations identiques, les frais sont facturés entre 0€, pour les banques en ligne, et 136€ pour la Banque Courtois. Sur une durée de prêt de 20 ans, en supposant que les tarifs restent constants (ce qui est faux puisque les banques en ligne vont continuer à se développer), la différence grimpe donc à 2720€, soit plus qu’une différence de taux brut de 0.1% sur un prêt de 200.000€ sur 20 ans (2300€).
article tres sympa et informatif!!