intro : ce portefeuille « tout terrain » est un classique de l’allocation d’actifs, popularisé par le gérant Ray Dalio. C’est un portefeuille est construit pour offrir un grande robustesse face aux variations des marchés. Pour ce faire, il s’expose à 3 grandes familles d’actifs : les actions, les obligations, et les matières premières, dans des proportions qui varient suivant les périodes.
le portefeuille « All Weather » selon ZoneBourse.com
Dans notre cas, nous avons choisi d’allouer notre capital suivant 4 classes d’actifs en ajoutant de l’immobilier de rendement. L’immobilier coté peut être considéré comme faisant partie de la famille des actions, mais il nous semblait important de s’exposer à un rendement spécifique à cette classe d’actifs : les loyers.
Investissement vs. Spéculation
Le mot « investissement » est souvent utiliser à tort quand il est associé à une classe d’actifs qui ne produit aucun rendement. Exemple :
« investir » dans l’or : non, l’or comme tous les autres métaux précieux ne produit rien. Le gain espéré repose uniquement sur une plus-value entre valeur d’achat et valeur de revente. Il s’agit donc de spéculation.
« investir » dans les crypto : non, un grand classique utilisé à tort par toutes les plateformes d’échanges. Et pour cause la plupart de ses plateformes prélèvent des frais de courtage très élevés. Pas étonnant que les incitations à ce type « d’investissement » se multiplient, les mouvements d’achat-revente faisant la fortune des courtiers en charge des transactions. Pourtant, comme pour les métaux précieux, les crypto ne « rapportent » rien. Elles stockent juste de la valeur qui fluctue suivant le cours du jour.
Un vrai investissement repose donc sur l’espérance d’un rendement futur qu’un capital peut fournir. Un investissement, lorsqu’il est mis en place, prévoit en général une période d’amortissement, c’est à dire une période au terme de laquelle la somme des flux qu’il procure est égal à la valeur de l’actif. Il existe 3 grandes familles d’actifs procurant un rendement :
les actions : l’émission d’actions est un moyen pour l’entreprise de se financier. En contrepartie du risque de perte de capital, l’entreprise émettrice fournit annuellement des dividendes. Attention, certaines entreprises ne paient pas de dividendes pour favoriser leur croissance, dans ce cas l’achat est donc uniquement spéculatif. Le rendement de l’entreprise est souvent exprimé en PER, ou Price to Earning Ratio. Plus le PER est faible, plus les bénéfices réalisés par l’entreprise sont important par rapport à la valeur de l’action. Attention, seule une partie des bénéfices est redistribué aux actionnaires.
les obligations : l’émission d’obligations est un autre moyen pour une entreprise, ou pour un Etat, de se financer. Contrairement aux actions, le rendement d’une obligation est connue lors de son émission. Ce rendement, appelé coupon, est payé périodiquement. Plus l’émetteur est fiable, plus le risque de défaut est faible, plus le risque de perte en capital est faible, et plus le coupon est faible. C’est pourquoi les obligations d’Etat (government bonds), ont des rendements inférieurs aux obligations d’entreprises (corporate bonds), elles-mêmes divisées entre IG (Investment Grade) pour les plus fiables, et les Junk Bonds, pour les moins fiables. Ce sont des agences de notation, dont le quasi monopole est tenu par les « Big 3 » (Moodys, Standard and Poors, Fitch), qui évaluent et notent le potentiel taux de défaut de l’émetteur sur la base d’une méthode d’évaluation « propriétaire ». A noter que ces agences ont fortement été critiquées lors de la crise 2008 des subprimes puisqu’elles avaient tendance à surnoter les émetteurs des fameux MBS (Mortgage-Backed Securities), qui n’étaient ni plus ni moins qu’une titrisation de crédits de propriétaires particuliers non solvables.
l’immobilier locatif : moins lié au monde de la finance, son fonctionnement est simple. Le propriétaire donne à bail son bien en échange d’un loyer payé régulièrement. Si le marché immobilier sur lequel se positionne le bien est relativement stable, on parle d’immobilier de rendement, c’est par exemple le cas dans les villes françaises de taille moyenne où la valeur d’un bien dépend beaucoup de la qualité du bâti, et moins de l’emplacement et du foncier à proprement parler. A l’inverse, si le bien se situe dans une zone tendue, sa valeur est plus spéculative et le rendement est plus faible, on parle d’immobilier patrimonial, c’est la cas des grandes villes comme Paris dont les prix ont fortement augmentés cette dernière décennie.
Choix des supports

$IESE affiche un actif sous gestion « relativement faible » : 3.6 Mds€ à fin mars 2023. En effet, si cet encours peut paraitre impressionnant pour un gestionnaire de fonds français type Financière de l’Echiquier (son best-seller Echiquier Agenor SRI Mid Cap Europe plafonne à 1.6 Mds€ d’encours), il reste faible pour la gamme iShares du leader BlackRock Europe qui produit des paquebots comme $CSPX (iShares Core S&P 500 UCITS ETF, 57 Mds$) ou $SWDA (iShares Core MSCI World UCITS ETF, 50 Mds$).
Néanmoins $IESE a la mérite d’être concentrée sur la zone Europe, et d’être un véhicule d’investissement socialement responsable (SRI = Socially Responsible Investment), qui évite les industries comme les armes à feu, armes controversées, armes nucléaires, tabac, charbon ou sable bitumeux.
Sa performance sur la période reste néanmoins très proche de celle des indices classiques non-SRI, ou non-ESG (Environmental, Social and Governance).


Grande question : l’année 2022 ayant subie un choc des taux obligataire de 300 points pour lutter contre l’inflation… Est-ce que $IBCI, sensé être protégé contre l’inflation, a bien été protégé de l’inflation ? Pour le savoir il faut prendre la performance d’un fonds centré sur les obligations d’Etat en zone Euro non protégé contre l’inflation ($IEGA produit par iShares), ajouter l’inflation de la zone Euro sur la période, et comparer la performance à $IBCI : c’est ce que l’on peut voir ci-dessous.

Donc :
- Performance $IEGA, Euro government bonds sur la période : -17.8%
- inflation zone euro sur la période : +9.2%
- soit performance $IEGA nette d’inflation : -17.8 + 9.2 = -8.6%
- Performance $IBCI, Euro inflation linked government bonds : -8.3%
Ce fonds obligataire protégé de l’inflation a donc parfaitement joué son rôle ! Malgré tout sa performance reste négative puisque lorsque les taux montent, les obligations baissent.


Pour cet ETF, nous n’avons trouvé ni la version capitalisante en USD (ticker $DPYA), ni la version capitalisante couverte en devise (ticker $DPYE). Nous nous sommes donc rabattu sur la version distribuant en US, dommage car les dividendes seront fiscalisés à l’impôt sur le revenu dans l’envelope Compte Titre.
L’indice EPRA/NAREIT (National Association of Real Estate Investment Trusts) publié par Footsie est un indice qui représente un large ensemble de REITs (Real Estate Investment Trust, l’équivalent de nos SIIC, Société d’Investissement Immobilier Côtée). Via cet indice, il est donc possible d’investir dans toutes les grandes foncières du globe telles Prologis, Public Storage, Realty Income, Vonovia, Unibail Rodamco etc…


L’ETF $EXXY est un swap sur les matières premières. Qu’est-ce qu’un swap ? C’est un contrat de gré à gré qui permet à deux financiers de s’échanger les flux générés par leur panier de valeurs respectif. Par exemple, A possède du CAC40, B possède du DAX40, A et B sont liés par un swap : Si le CAC40 fait +12% à la fin de l’année, et que le DAX40 fait 5% à la fin de l’année, alors A reverse la différence de 7% à B, sans échange de titre.
Il existe différents type de swap, swap de devises, swap de taux, etc… Dans notre cas iShares achète un panier d’actions, puis échange la performance de ces actions contre un panier de contrat à terme sur un ensemble de matières premières tel que le future gold, le future oil, cuivre, soja, gaz naturel, aluminium, bétail etc…
En période d’inflation, les matières premières en général, et l’énergie en particulier se sont révélés être d’excellent placement : +22% en 2022. Dommage pour les écolos qui avaient misé sur des portefeuille vert décarbonés, ils n’ont pas pu bénéficier de cette hausse.

Robustesse du portefeuille
Nous arrivons à la meilleure partie de cet article : quel est la robustesse de ce portefeuille et comment la déterminer ? Quelle est la performance, quelle est la volatilité, comment les mesurer ?

Le tableau ci-dessus nous donne 3 indicateurs clés pour caractériser un portefeuille :
la performance : facile à calculer, c’est le ratio entre la valeur au 31 décembre total return (donc dividendes et coupons inclus), et la valeur au 1er janvier de l’année. Ici on voit que la performance globale du portefeuille est négative : -7.30%, mais que les matières premières ont grandement contribuées à limiter la casse. C’était donc LA ligne a détenir en portefeuille en 2022.
la volatilité : plus difficile à calculer puisqu’il s’agit de l’écart-type, donc de la moyenne des écarts à la moyenne, d’une série de valeurs quotidiennes sur l’année. Cet écart-type peut être utilisé dans une distribution de type loi normale puisqu’il est directement lié à la probabilité future. Typiquement, il y a 68% de chance pour que la valeur d’un actif soit dans la plage +1 / -1 écart-type. Calculer la volatilité d’un portefeuille à partir de la volatilité de ses composants est assez compliqué puisqu’il faut prendre en compte la pondération de chaque composant, ainsi que la corrélation de chaque composant entre eux. Plus de détail ici pour le calcul. A retenir : la volatilité du portefeuille de +11.8% est inférieure à la volatilité de chacun de ses composant pris individuellement.
la ratio de Sharpe ou le rapport entre surperformance par rapport au taux sans risque et volatilité, est un indicateur clé dans la gestion de portefeuille. Exemple : si vous réaliser +10% de performance annuelle sur un actif très volatil genre Bitcoin, vous avez pris plus de risque que si ces même 10% de performance sont réalisés sur un actif moins volatil genre ETF zone Europe. A noter que le numérateur de ca ratio corrige la performance du taux sans risque. En effet, aucun mérite pour un fonds actions d’afficher 3% de performance annuelle si cette même performance peut être atteinte par un livret A, au capital garanti et net de fiscalité.

La ratio de Sharpe de notre portefeuille All Weather est donc négatif, à -0.62. Négatif car il affiche une performance négative sur l’année, mais néanmoins meilleur que chacun des fonds Actions / Obligations / Immobilier pris individuellement.
Diversification et corrélation. Sur l’année 2022, on voit que la performance du portefeuille a été tirée vers le haut par les matières premières, dont le coût a fortement augmentée due à l’inflation. Sur la matrice ci-dessous on voit que cette ligne Matières Premières est complètement décorrélée des Actions et Obligations : c’est ce type de diversification qui apporte de la performance et réduit le risque.

Conclusions
Ce petit portefeuille, capitalisé à seulement 1000€, nous permet d’explorer en toute indépendance la performance du modèle de portefeuille créé par Ray Dalio. Avec en prime, un coût de gestion très réduit puisque les frais courants s’élèvent à seulement 0.32%, à des années lumières d’assurance vie en gestion pilotée distribuée par une banque !
